Le politique Benjamin ConstantNé le 25 Octobre 1767 et mort le 8 décembre 1830

Benjamin Henri Constant de Rebecque naît le dimanche 25 octobre 1767, à Lausanne. Exceptionnellement doué, Benjamin a une enfance difficile, ballotté à travers l’Europe, livré à des précepteurs souvent débauchés. Il fera des séjours plus ou moins brefs en Angleterre.

Un adolescent turbulent

À Paris, alors qu’il n’a que 18 ans, il s’éprend d’une femme de 30 ans son aînée. Une tendre amitié lie madame de Charrière à Benjamin. Sa rencontre avec Germaine de Staël, dont il s’emmourache, va changer sa vie. Sainte-Beuve, le grand critique bienveillant le décrit : « C’était un grand beau jeune homme, d’un blond hardi, muscadin, à l’air candide, mais en dedans très avancé, très désabusé. » Il souhaite obtenir la nationalité française arguant que ses ancêtres ont dû s’expatrier pour cause de religion. Maintes fois, elle lui sera refusée.

Benjamin propriétaire terrien

Il achète des biens nationaux, comme l’abbaye d’Hérivaux, proche de Luzarches, pour 50 000 F, qui se compose de la maison conventuelle, de l’église, de la grange, des communs et de 224 arpents. « Je viens de faire un marché, tel qu’il est difficile d’en imaginer un. J’ai acheté un fonds de terre pour 30 000 F de France et il m’assure 8 000 F de rente. » Madame de Staël y réside de Noël 1796 à avril 1797. Elle y reçoit Mathieu de Montmorency, Talleyrand – dont elle a facilité le retour en France – Adrien de Mun, Madame de Noailles… Pendant ce temps, Benjamin prépare les élections cantonales où il est élu en 1798. Peu après, il brigue un siège d’agent municipal et l’obtient.
Il est nommé au Tribunat (25 décembre 1799), c’est un premier pas. Mais dix jours plus tard, il prononce un discours qui le classe parmi les opposants. Bonaparte est perplexe, irrité, très violemment irrité. Benjamin Constant est radié.

D’Hérivaux aux Herbages Saint-Martin-du-Tertre

Il se sépare d’Hérivaux. Il a transformé cette abbaye en carrière de pierre faisant abattre l’église, les deux tiers du palais abbatial, pour ne conserver que ce nous voyons aujourd’hui, ayant trouvé des fonds pour aménager une vaste pelouse avec un étang à son extrémité, encore visibles. Un autre refuge les Herbages sont déjà dans ses intentions. D’ailleurs, Julie Talma confirme ce propos : « Dites un mot, mon ami, au moindre signe nous ferons atteler ! … les rosses pour Franconville ! » Le 26 avril 1802, il acquiert à Saint-Martin-du-Tertre un lieu qu’il nomme les Herbages consistant en près, bois et terres. Il se présente devant le maire Amiot qui relate ainsi l’événement : « Aujourd’hui, deuxième jour complémentaire, l’an onzième de la République s’est présenté à moi, Maire de la commune de S. Martin du Tertre, soussigné, le Citoyen Benjamin Constant, ex-membre du tribunat, et président de l’administration municipale du ci-devant canton de Luzarches et ci-devant domicilié dans la dite commune de Luzarches, lequel m’a déclaré qu’il venoit établir son domicile, à compter de ce jour, aux Herbages… »

Acquisition de peu d’importance, qu’il décrit ainsi « ma campagne est un vrai désert, mais un désert qui sera charmant : un ruisseau, un bois, une prairie, voilà tout mon domaine ». En septembre, il y vient souhaitant ranger sa bibliothèque, qui comprend 2 944 volumes, plus 500 qu’il fait venir de Paris. Ce travail est achevé que le 23 janvier 1805. Selon son humeur, il vient y travailler à de nombreux ouvrages comme : De la religion ; Fragments d’un ouvrage abandonné sur la possibilité d’une constitution républicaine dans un grand pays (ouvrage inédit de son vivant, probablement rédigé entre 1795 et 1810), etc.

En 1807, les Herbages ne font pas partie des joies de Benjamin qui les fuit : « La campagne est horrible. Il n’y a pas une feuille sur les arbres. Le vent de l’hiver souffle à travers leurs branches noires. Rien n’annonce encore le printemps de la nature qui m’est d’autant plus nécessaire que l’automne  a déjà commencé pour moi. » En 1808, bien qu’ils se soient retrouvés moult fois secrètement aux Herbages avec Charlotte de Hardenberg, qu’il épouse sans en informer Madame de Staël. Mais leur bonheur prend fin, en ce lieu, le 31 décembre 1810 avec la vente de leur nid. Ils n’y reviendront jamais au village.

S’il ne fut jamais élu à l’Académie française, malgré plusieurs tentatives, lors de ses obsèques une foule considérable le conduira au cimetière. Des ministres, des généraux, des députés, des pairs de France, des amis académiciens, un escadron de cavalerie devancent le cercueil.  Après la cérémonie au temple de la rue Saint-Antoine, il était protestant, le cortège se met en marche. On remarque une voiture du roi, une du duc d’Orléans, une autre des blessés de Juillet. Les étudiants détèlent les chevaux du char funèbre et le traînent au Père-Lachaise.

Du nom des Herbages

Le lieu-dit les Herbages n’existe pas, le cadastre napoléonien ni aucune carte ne le mentionnent, c’est une pâture et Benjamin avait décidé d’appeler son acquisition les Herbages ce qui a fait commettre de nombreuses erreurs à des ‘‘historiens’’ qui les ont situés à Maffliers, à Luzarches et même en Suisse…

Sources et références

  • Sainte-Beuve Charles Augustin
    Causeries du lundi, t. XI, p. 439-440. Paris s.d.
  • Rudler Gustave
    La Jeunesse de Benjamin Constant (1767-1794), p. 65-67. Paris 1909.
  • Duruy George
    Mémoires de Barras, membre du Directoire, t. II, p. 102, t. III, p. 199-200. Paris 1905.
  • La Revue des Deux Mondes
    Volume 34, juillet-août 1906, Lettres de Benjamin Constant à Prosper de Barante.
  • Tambour Ernest
    Études sur la Révolution dans le département de Seine-et-Oise, p. 279-280, 293, 313-315, 258, 378. Paris 1913.
  • Constant de Rebecque (baronne)
    Publiées par, Lettres de Julie Talma à Benjamin Constant, p. L, 28, 30, 38, 196. Paris 1933.
  • Constant Benjamin
    Journaux intimes, p. 298. Paris 1952.
  • Bastid Paul
    Benjamin Constant et sa doctrine, t. I, p. 1994. Paris 1966.
  • Baduel Daniel
    Saint-Martin-du-Tertre : un village, une histoire, p. 293-318. Seugy 2000.
  • Archives nationales, archives départementales du Val-d’Oise, archives municipales de Saint-Martin-du-Tertre.